Définir un « bon » produit ? C’est poser la mauvaise question

On me demande souvent : C’est quoi, un bon produit ?

J’ai longtemps évité de répondre. Parce qu’un produit, ce n’est pas un monument figé. C’est une rencontre. Une collision fertile entre une promesse claire, un usage situé, et un client qui s’y reconnaît. Un produit avant d’être un « objet », il doit être ce qu’il porte.

Chercher la perfection « ex ante », c’est bâtir une cathédrale dans le désert : grand, beau, vide.

Nous ne vivons plus dans un monde linéaire. Le mythe du consommateur moyen appartient à l’histoire. Nous sommes passés dans un monde fragmenté, hybride, accéléré, où la valeur émerge d’une justesse contextuelle. Je suis convaincu que nous avons basculé dans une société topologique : un monde de proximités plutôt que de distances, les lieux, physiques et digitaux, prennent la main sur les distances. Les distances ont signé une époque, « The World Is Flat « , »La Fin de l’histoire et le Dernier Homme » mais cette époque est révolue. Présentation dans ce texte.

Dans cet environnement, viser un produit parfait pour tout le monde n’est pas seulement inefficace : c’est une stratégie hors sol.

Le retail l’a vécu de plein fouet : des chaînes de valeur pensées pour des flux prévisibles confrontées à la discontinuité. Ce que je détaille dans Oublier le retail, nous vivons une révolution.

Face à cela une stratégie basée sur le  » Product-Led Growth » (PLG) s’impose comme une évidence. L’usage comme point d’entrée. Le produit comme vecteur d’adoption. La croissance comme conséquence d’un ajustement fin entre valeur perçue et situation réelle.

Ce modèle repose sur un principe simple : le client ne s’achète plus, il s’attache. L’usage précède la vente. La preuve précède la promesse.

Nous sommes dans une relation de coconstruction, bi-directionnelle et cela tire le marketing et la vente, ou plutôt la réputation et le faire acheter.

You’re doing sales because you failed at marketing.
You’re doing marketing because you failed at product.

Naval Ravikant, 20 mars 2022.

Définir un produit, aujourd’hui, c’est le mettre à l’épreuve du réel. Le confronter à des usages non anticipés. Laisser émerger l’adhésion. Laisser quelques utilisateurs tomber amoureux.

C’est là que naît ce que j’appelle un Minimum Lovable Product. Pas un MVP au rabais. Une version suffisamment juste pour que quelques-uns s’y engagent car il se reconnaissent dans ce qu’il porte. Ils en deviennent, par leurs retours, vos premiers concepteurs. Bienvenue dans un marché tiré, par une fragmentation engagée.

Reid Hoffman disait : Si vous n’êtes pas embarrassé par votre première version, c’est que vous l’avez lancée trop tard. J’ajoute : Si personne ne s’en est épris, c’est que vous l’avez lancée trop loin des proximités qui comptent.

Une stratégie PLG n’est pas une stratégie miracle. C’est une exigence. Celle de mettre le produit à sa juste place : ni objet sacré, ni support de vanité. Mais un vecteur de vérité. Les géants par leur taille ou leur vitesse de croissance de la tech l’ont depuis longtemps bien compris. Finaliser, promouvoir et vendre coute aujourd’hui trop cher, il faut faire travailler le client et le laisser trouver son propre chemin pour se réaliser dans votre produit.

Ce que nous apprend ce modèle, c’est qu’il ne suffit pas d’avoir une bonne idée. Il faut une exécution au bon endroit. Une architecture cohérente. J’aborde dans ce post la nécessaire maitrise de ses invariants.

Ce travail suppose un alignement : vision, modèle de données, système d’information. C’est à cette condition que la technologie cesse d’être du bruit et devient un levier. Pas pour faire plus, mais pour faire juste grâce et dans le respect de ses fondamentaux.

Je parle principalement de produits numériques mais je crois que cette approche s’étend de plus en plus aux produits physiques.

Comdab, preneur de vos feedbacks, et surtout un grand merci de votre attention.

Retour en haut