Je constate dans de nombreux projets IoT, de type SmartCity, Centres commerciaux, et plus globalement de communautés d’acteurs… que le challenge n’est généralement pas positionné là où on l’attend et en tous les cas là où on le cherche.
En effet, le challenge n’est généralement pas de collecter la donnée. Le vrai challenge est de créer et valoriser la bonne information en fonction de son demandeur et cela autant que possible de manière dynamique.
Pour rappel une donnée est définitive, peut être comprise sans ambigüité et se suffit à elle-même dans le contexte de sa création. Elle a un propriétaire unique et identifié.
En revanche une information est créée à partir de données en fonction du contexte et du demandeur.
Ma date de naissance est une donnée. Elle se suffit à elle-même dans le contexte d’un calendrier grégorien.
Mon âge est une information, elle varie en fonction de l’année et peut varier en fonction du demandeur … https://newpp4cm.wordpress.com/2015/01/22/particulier-entreprise-ne-vous-laissez-plus-piller-revoltez-vous/>
L’enjeux des projets IoT n’est donc pas selon moi dans la capture des données mais bien dans la manière dont je vais créer/générer/monétiser des informations pour un échange.
Je capture une température, quelle est la précision de la mesure, l’heure, minute, seconde, où précisément est-elle prise… Seul l’acteur qui a fait ce relevé le sait. C’est une donnée sans ambiguïté dans le contexte du matériel de mesure.
Petite aparté, le contrat est-il toujours clair entre le fabricant ou propriétaire du matériel qui sert à faire le relevé et l’opérateur qui crée la donnée sur le droit de propriété de cette donnée … Même question sur la responsabilité. Sujet important que je ne traiterai pas ici.
Donnée créée, je peux proposer/vendre une information. Je dois évaluer le couple précision de l’information et prix en fonction du contexte et de mon interlocuteur. Une information doit avoir un coût différent en fonction de sa précision (température à la seconde ou moyennée, lieux précis ou au niveau de la région, … ) si on est un minimum commerçant.
Une grande partie du savoir-faire n’est donc pas la capture, mais bien l’analyse de la valeur de l’information en fonction du contexte et de l’interlocuteur. Par exemple pour le grand public, la monétisation se fera par la publicité, le prix sera donc faible, la précision de l’information sera moyenne voire faible et sans engagement. En revanche pour l’agriculteur, prêt à payer, il sera proposé une information précise et certifiée.
De plus, bien souvent les informations sont combinées entre elles pour apporter une information à plus forte valeur ajoutée. Elles font parfois l’objet d’échanges pour que chacun propose des services à forte valeur ajoutée à sa communauté. Nous avons donc à gérer une problématique de trade ou market place de l’information.
Ces opérations de commerce sont souvent en temps réel car la fraîcheur de l’information est un élément clé dans sa valeur.
- Premier défi, détermination de la valeur d’une information générée en fonction du contexte, moment, et du demandeur
- Deuxième défi, la difficulté de qualification de la qualité d’une information construite à partir de plusieurs informations.
Pour ceux qui veulent aller plus loin
Prenons l’exemple d’une zone d’activités commerciales.
Les marques des produits de grande consommation, les distributeurs, le propriétaire de la zone commerciale, les services de transports, la commune, … tous cherchent à interagir avec le visiteur/consommateur afin de lui proposer des services et de mieux comprendre son comportement. Cette interaction passe de plus en plus par des stratégies IoT / CRM au sens large: Les capteurs, compteurs, détecteurs, applications smartphone, bornes, … passifs ou activés par les usagers, d’une part et d’autre part des plateformes de services.
Aujourd’hui, le plus souvent, chacun travaille dans son silo… avec son couple collecte/traitement. Et parfois il consent à donner des informations, mais souvent se contente d’exporter ses données 🙁 Nous sommes très rarement dans l’échange d’informations valorisées avec son modèle économique associé.
Pour libérer enfin la valeur, il est nécessaire de mettre en place un certain nombre d’éléments entre les acteurs souhaitant collaborer autour d’une même dynamique.
Toujours pour une zone d’activités commerciales, mais est bien sûr réplicable pour de nombreuses autres situations, voici une liste à la Prévert et non exhaustive de challenges à résoudre ou tout au moins à identifier:
- Fédération d’identité pour maitriser de manière fluide l’identification des acteurs par leurs attributs et pas uniquement leur identité. (exemple: identifier un vendeur non par son identité mais par le fait que son enseigne me garantisse qu’il est un vendeur => centre commercial pourra laisser entrer le vendeur car son statuts est garanti par son employé. Plus besoin de gérer la liste des identités de l’ensemble des employés du centre ).
- Maitrise de la bascule Data/Information: Définition et qualification des informations afin que chacun puisse proposer (contenu, qualité, responsabilité, temps de réponse) et prix/valeur associées. Exemple: Définir les notions de valeurs, qualité, et de responsabilité des fournisseurs d’infos… pour qu’il n’y ait pas de malentendu dans l’intégration et l’interprétation …
- Marketplace pour composer les chaînes valeurs: une adresse ou l’ensemble des acteurs trouveront l’ensemble des services (API ou SDK). La zone d’activité sera donc non seulement une plate-forme physique mais également une plate-forme digitale.
- Enrichissement des informations et valorisation dans le temps par ajout d’attributs contextuels. Exemple: si je demande le nombre de visites dans la journée, il peut être intéressant de rajouter la date.
- Double check pour maitriser les attaques par injection de mauvaises données ou informations
- OpenData: Le partage peut avoir beaucoup de valeur pour le fournisseur ou le consommateur
- Gestion des APIs: Dans une économie de plate-forme, la maitrise technique, fonctionnelle et économique des APIs est fondamentale.
- Une plate-forme à la fois de VRM (Vendor Relationship Management) pour que le visiteur puisse lui-même piloter ses chaines d’information et donc d’interactions et une plateforme de CRM pour que les acteurs fournisseurs puissent échanger, « trader » en temps réel.
- … On pourrait rajouter de nombreux autres sujets
Et naturellement tout cela doit se faire de manière distribuée afin que chacun puisse avoir son mot à dire. Plus globalement on peut parler de plate-forme xRM (X Relationship Management) ou en d’autres termes d’échanges et donc de commerce, au sens large, distribué. Il est d’ailleurs fort probable que rapidement la technologie blockchain en devienne un « enabler » incontournable.
Un modèle de multi-gouvernance, avec conscience de la notion de données et informations avec une capacité de « trade » temps réel par l’individu et les acteurs publiques ou privés reste à construire mais selon moi sera un incontournable à l’avenir. Ce sera très complexe mais nous commençons à en voir des ébauches. Cette étape est fondamentale pour le développement des économies digitales